Allemagne : le nouvel espoir des réfugiés syriens et un nouveau clivage de la société allemande
Charlotte Flory
Outre-Rhin,
on tente de jouer un rôle majeur dans la solidarité à l’égard des
réfugiés syriens avec tout de même une certaine réserve. Pour le moment
le taux d’admission et la logistique ont du mal à être à la hauteur des
engagements. Face à l’arrivée de ces réfugiés, depuis fin octobre 2014
l’Allemagne est divisée entre les partisans du mouvement Pegida et ses
opposants.
L’Allemagne,
qui n’a pas envoyé de forces militaires combattre en Irak et en Syrie
s’illustre différemment en développant un programme humanitaire afin de
venir en aide aux populations éprouvées. Elle tente ainsi de renforcer
la stabilité de la région et de ce fait assurer une trêve plus durable.
C’est dans cette optique que le ministre des affaires étrangères
Frank-Walter Steinmeier a appelé la communauté internationale à faire
preuve de solidarité envers les pays voisins de la Syrie lors de la
conférence internationale des réfugiés qui se tenait à Berlin ce mois
d’octobre. Convaincue que la crise syrienne n’est pas prête d’être
terminée, l’Allemagne a donc adopté la stratégie qui consiste à aider
les pays qui accueillent le plus de réfugiés : la Jordanie, Turquie et
notamment le Liban qui a vu sa population augmenter d’un tiers à cause
de ce conflit. “L’Allemagne veut montrer son soutien au Liban concernant
les problèmes qu’il rencontre actuellement, en particulier la situation
difficile du voisinage de la Syrie et l’afflux grandissant du nombre de
réfugiés”, a expliqué Angela Merkel, la chancelière allemande.
L’Allemagne a donc débloqué un budget de 650 millions d’euros pour la
crise syrienne depuis 2011. Un bémol cependant : le gouvernement syrien
étant reconnu par l’ONU, c’est lui qui décide de la manière d’employer
l’aide humanitaire dans son pays. Il est donc suspecté par certains
d’utiliser, au moins en partie, cet argent à des fins militaires. De
plus, les convois humanitaires devant traverser les lignes de front, ils
n’arrivent pas tous à bon port ce qui limite l’aide aux réfugiés.
L’Allemagne
qui a revu à la hausse sa capacité d’accueil des réfugiés syriens en
annonçant en juin 2014 qu’elle accueillerait 10 000 personnes de plus
que le quota initialement prévu, est en tête des pays européens. Mais la
plupart de ces réfugiés venus en Allemagne l’ont fait par le biais du
regroupement familial. Ce qui signifie qu’il est nécessaire d’avoir de
la famille résidant en Allemagne et que celle-ci soit prête à subvenir
aux besoins des réfugiés. De plus, l’accueil de personnes qui
contribueront par la suite à la reconstruction de leur pays est aussi
privilégié. Cependant ce n’est pas sans peine pour eux : en effet les
obstacles bureaucratiques et policiers sont de taille et ont pour le
moment fortement limité l’acceptation des demandes d’asile.
Tout est mis en place pour faire au mieux : la possibilité d’accueillir encore plus de Syriens ayant de la famille est laissée à l’appréciation de chaque Land. Cependant ces directives ont des limites. De nombreuses communes ne peuvent assurer un tel accueil et mettent donc à disposition des anciennes écoles ou bureaux désaffectés : les conditions d’accueil sont donc précaires avec des sanitaires non adaptés et un manque d’espace. C’est pour palier à ces difficultés que certaines entreprises ont décidé de s’investir dans cette lutte et mettent ainsi à disposition des locaux inexploités. L’étude à Munich du cas de l’entreprise Siemens qui a proposé de mettre à disposition 30 000 mètres carrés de locaux vides possédant cantines et sanitaires est en cours. « Siemens est une entreprise avec une forte tradition sociale » explique le PDG de celle-ci.
Cependant
cet accueil n’est pas vu d’un bon œil par l’ensemble des citoyens : le
mouvement Pegida, un mouvement anti-islamiste « de patriotes européens
contre l’islamisation de l’Occident » organise tous les lundis des
manifestations à Dresde mais aussi dans d’autres villes allemandes. Ces
mouvements entrainent des contre-manifestations encouragées par le
gouvernement : « Ne suivez pas ceux qui appellent à manifester. Leurs
cœurs contiennent trop souvent des préjugés, de la froideur et de la
haine » a déclaré Mme Merkel lors de ses vœux pour le nouvel an.
Lorsque
l’on sait que près de 2,9 millions de Syriens ont déjà fui leur pays
dont 1,1 million au Liban, le nombre de ceux qui sont accueillis en
Allemagne reste faible bien que les efforts fournis par les autres pays
européens soient encore plus négligeables (par exemple, la France a
accueilli depuis 2012 8000 réfugiés syriens).
Ainsi
les associations de protection des droits de l’homme réclament une plus
grande ouverture des frontières européennes mais sans suite pour le
moment.
Un abri pour réfugiés à Durchsal en Allemagne
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